samedi 28 avril 2018

Swimming Pool


Ces derniers mois, je suis beaucoup allée à la piscine. Je fréquente celle du Forum des Halles et celle tout près du Parc Monceau, la piscine en inox Jacqueline Auriol.


A priori pourtant, je n'aime pas trop :

- à Paris, les piscines sont surpeuplées et c'est vraiment stressant de s'entrechoquer sans cesse.

- je ne suis pas une championne et ça m'énerve, moi qui aime être toujours la meilleure. La natation, c'est surtout de la technique et je ne suis pas à niveau. Et puis, je manque de puissance, je ne suis pas baraquée. Alors je triche et je nage avec des palmes.

- la natation, c'est d'une efficacité sportive assez médiocre. Rien à voir avec le jogging et le vélo. Au bout d'une heure de natation, je me sens à peu près aussi fatiguée qu'après avoir fait mes courses au marché des Ternes.


Mais il y a bien sûr aussi autre chose qui me fascine et m'attire. En fréquentant les piscines, on bascule dans un autre monde, à la fois proche et lointain.


C'est d'abord une esthétique: 

- une lumière bleue partout diffuse, éclatante, irisée, avec de simples nuances, sombres ou foncées,
- des sons étouffés, amortis, des bruits de ruissellement, clapotis. 

Une espèce de monde ouaté où rien ne blesse ni n'agresse, immergé dans une couleur propice au rêve.


Et puis, on devient anonymes: avec nos bonnets en silicone, nos grandes lunettes, nos maillots de piscine très couvrants, plus personne ne peut nous reconnaître. Néanmoins, on se mate tous les uns les autres.


On n'a plus de visage, on n'est plus qu'une forme, un corps réduit à sa simple silhouette.

Les vêtements ne sont plus là pour cacher nos imperfections. Notre beauté (ou notre laideur) sont livrées sans détour, à l'état brut. 

Et c'est souvent ravageur: telle fille qu'on croyait belle se révèle mal foutue à la piscine.

Ça me fascine et j'avoue que j'adore cette épreuve du regard que les autres portent sur mon corps. Il est vrai que j'ai la faiblesse d'être assez fière de ma silhouette.


Surtout, aller à la piscine, c'est se confronter à cette relation, beaucoup moins simple qu'il n'y paraît, que chacun de nous a avec l'eau. 


Cette relation plus ou moins compliquée traduit, j'en suis convaincue, beaucoup d'éléments profonds de notre personnalité. Elle est véritablement chargée d'inconscient.


On a des relations très diverses mais toujours affectives avec l'eau. Il y a ainsi les gens, nombreux, qui ont une phobie de l'eau ou qui ne savent pas nager. Il y a ceux qui n'aiment pas mettre la tête sous l'eau, qui n'aiment pas y expirer, qui ne pratiquent ni la brasse coulée, ni le crawl. Il y a ceux qui n'aiment pas les grandes profondeurs. Bien nager, ça repose d'ailleurs beaucoup sur la psychologie: il faut se sentir à l'aise, décontracté, en parfaite symbiose, sinon on avance comme une brique.

En ce qui me concerne, je n'aime vraiment nager que sous l'eau, le plus possible en apnée d'un bout à l'autre de la piscine. J'aime bien me mettre à l'écart, au fond de l'eau, et percevoir d'en-bas, les autres nageurs. Le sous-l'eau, j'aime donc beaucoup; en revanche, je n'aime pas trop nager en haute mer ou dans les profondeurs. Est-ce qu'il n'y a pas là-dessous plein de sales bêtes qui vont m'attaquer ? 


En fait, je crois que dans la relation d'amour/haine qu'on a avec l'eau, on rejoue tous cette période de neuf mois durant la quelle on baignait dans le liquide amniotique maternel. On est nostalgique car on y était en paix, on veut y retourner, ou alors on exècre et on veut s'en détacher définitivement. C'est peut-être pour cette raison qu'on est plus ou moins bon nageur.

Ça peut sembler, bien sûr, de la psychanalyse de bistrot mais le fait est que, dans toutes les cultures, on associe la mère et la mer. 


Images de Maria SVARBOVA, artiste (peintre et photographe) slovaque  née en 1988.

Je renvoie, sur cette question du plaisir de l'eau, au livre récent de Chantal Thomas, "Souvenirs de la marée basse", consacré à sa mère qui était une grande nageuse. 

Par ailleurs, j'ai dit, jusqu'alors, beaucoup de mal et d'horreurs de la musique de variétés française. Mais je viens de découvrir le groupe CANINE. Il n'existe aujourd'hui qu'un EP qui vient de sortir mais vous pouvez écouter "Twin Shadows", "Glow" et "Two weeks" sur Internet. J'aime bien aussi "Hyphen Hyphen". Le groupe va sortir un nouvel album, "HH", le 25 mai prochain. A écouter en pensant à moi.

Si vous envisagez d'aller au cinéma, je vous conseille: "Mes provinciales" de Jean-Paul Civeyrac, "Nico, 1988" de Susanna Nicchiarelli et "Transit" de Christian Petzold.

Je vous annonce, enfin, la suspension de mon blog durant quelques semaines. Je pars en effet à Tachkent mardi prochain. A bientôt

samedi 21 avril 2018

Le frisson de la peur


Lorsque j'étais à Moscou, on m'a présenté, lors d'une soirée, Angela Nikolau.

Je ne la connaissais pas. J'ai d'abord cru que c'était une jolie fille, comme on en rencontre des milliers en Russie, avec des rêves banals de célébrité dans la mode ou les médias. Je l'ai presque snobée.


Et puis, elle m'a montré ses photos Instagram et ses vidéos You Tube.

Alors là, j'ai été scotchée, fascinée. Voilà vraiment quelqu'un qui a quelque chose de plus que moi, quelque chose que je n'aurai jamais.

Angela a 24 ans et elle est une "roofer". Le "roofing", ça consiste à faire l'ascension, à mains nues et sans assistance, des monuments emblématiques des grandes villes.

Angela parachève cet exploit avec des photos impressionnantes au sommet: les selfies les plus audacieux au monde.


Le roofing" est assez à la mode chez les jeunes en Russie. Il faut dire que ça correspond bien à la folie, la dinguerie slave. C'est peut-être mieux que le "zapoï" (cette coutume qui consiste à boire sans arrêt pendant plusieurs jours) mais ça se termine, souvent aussi, de manière tragique. Curieusement, ça n'est pas tellement réprimé par les autorités (juste une petite amende).


C'est pour moi une performance incompréhensible qui dépasse absolument tout ce que je pourrais être capable de faire. J'ai un effroyable vertige dès que je suis au premier étage de la Tour Eiffel ou au sommet de Notre Dame de paris. En fait, je me sens irrésistiblement attirée par le vide et il faut vraiment que je lutte pour ne pas me précipiter dans le gouffre. J'ai l'impression que le vide active la pulsion de mort en moi, mon angoisse suicidaire.


Jamais on ne me fera faire d'alpinisme, de parachutisme ou de deltaplane. Je suis sportive mais je déteste ce qui implique une prise de risque disproportionnée: pas de moto, pas de plongeon de haut vol, pas d'équitation, pas de course automobile. S'agit-il d'ailleurs encore de sport ? N'importe quel buveur de bière peut faire du parapente, de la moto, du plongeon.


En fait, ce qui se joue dans ces sports extrêmes, c'est le rapport de chacun à la mort, sa propre mort. Angela m'a dit qu'elle était totalement confiante et n'avait peur à aucun moment. J'ai l'impression, en fait, qu'elle est bien une personne de son époque, vivant dans le déni total de la mort. La mort, c'est devenu tellement dérangeant qu'on la refoule complètement, qu'on ne croit plus qu'elle est possible.


Photos d'Angela Nikolau. Je vous conseille vivement son site Instagram et ses vidéos. Faites-moi savoir si ça vous fait frissonner autant que moi.

samedi 14 avril 2018

Mes voisins


On prend plaisir à afficher ses nombreux amis, ses relations professionnelles innombrables, ses liens multiples dans les réseaux sociaux, ses fréquentations dans les milieux associatifs, culturels, artistiques. On est tellement ouverts, curieux, sociables, attentifs et ouverts aux autres.


Mais ceux dont on ne parle presque jamais, même s'ils sont tout proches de nous et quotidiennement présents, ce sont nos voisins..., nos voisins d'immeuble ou de quartier.


Si on le fait, c'est plutôt pour en dire des horreurs. Le voisin, c'est souvent celui qui pose problème: il fait du bruit, on a les odeurs de sa cuisine, il  jette partout des papiers et mégots, il occupe deux places de parking, il est impoli. Le voisin, c'est souvent l'ennemi. Le voisin, c'est celui qui trace les limites de ma convivialité.


Habiter quelque part, trouver un logement, c'est aujourd'hui un grand problème; c'est presque angoissant car il y va de notre identité. C'est d'abord un lieu. En France, on me demande tout de suite où je vis. Ça permet de me situer, paraît-il: tu vis à Paris mais où à Paris ? Mais c'est vraiment difficile de trouver un lieu avec lequel on se sente en totale harmonie, un lieu qui nous corresponde, dans lequel on se sente protégé. On élit un quartier, une ville, principalement sur des critères sociaux pour retrouver des semblables. Mais la grande inconnue, même quand on est entre soi, ce sont les voisins. L'idéal, c'est une maison à l'écart sans voisins.


Les voisins, on les côtoie corps à corps mais ça n'est pas facile. On se méfie d'eux, on est suspicieux à leur égard. On colporte volontiers des ragots, des rumeurs à leur sujet. On craint qu'ils ne nous observent sans cesse, ne nous épient. Avoir un voisin qui soit un voyeur, c'est une hantise très répandue. Et puis, on a toujours un peu honte avec un voisin parce qu'il en connaît toujours un peu plus sur notre intimité que la plupart de nos amis et collègues. Au mieux, on vit avec ses voisins dans une relation de froide politesse, d'indifférence, mais ça peut mal tourner, devenir brutalement violent.


Tout ça n'est, bien sûr, pas très joli et j'exagère sans doute. Mais les haines les plus féroces, les querelles les plus violentes, puériles et innombrables, sont bien celles qui se tissent entre voisins. C'est devenu la forme moderne du conflit guerrier. Le voisin, c'est, vraiment, celui qui démontre qu'à rebours des apparences, je ne suis peut-être pas si sociable que ça.


Pour terminer, je préciserai tout de même que, pour ce qui me concerne, je ne rencontre pas de  problèmes avec mes voisins. Bien sûr, ce n'est pas comme dans un pays slave où les voisins viennent sans cesse en visite pour les motifs les plus futiles. Bien sûr aussi, je tais complètement mes origines de peur d'éveiller les soupçons (trafiquante, call-girl).
Mais au total, j'ai la chance de vivre en un lieu qui me convient, tout près du Parc Monceau à Paris. Mais j'ai aussi conscience que c'est un espace cloisonné, peut-être privilégié, en tout cas pas représentatif de la société française. Et puis, comme dans la plupart des immeubles aujourd'hui, c'est une espèce de bulle ultra-sécurisée (gardien, vidéo-surveillance, multiples codes d'accès, portes et fenêtres anti-effraction) et ça aussi, c'est angoissant. On se protège de plus en plus de tout contact avec l'extérieur, l'autre.


Tableaux de Paula REGO, artiste plasticienne portugaise née en 1935.

Ce post m'a été inspiré par l'excellent livre de la philosophe Hélène L'Heuillet "Du voisinage" paru en septembre 2016.

dimanche 8 avril 2018

Islamisation


Dans son dernier livre "Soumission",  Michel Houëllebecq décrit une France choisissant la voie d'une islamisation douce, librement consentie. Une société pacifiée dont la séduction première est d'offrir une intelligibilité simple avec une organisation clairement définie. On n'a plus rien à craindre des bouleversements de l'histoire.


Cette vision est apparue absurde, délirante, à beaucoup de lecteurs.

Peut-être, peut-être... l'Islam fait peur mais il faut reconnaître que les sociétés musulmanes offrent une certaine harmonie, une certaine qualité de vie: elles sont compréhensibles, elles échappent aux aléas de l'Histoire.

Et est-ce qu'on ne s'achemine pas vers ça justement, est-ce qu'on n'aspire pas, de plus en plus, à vivre dans des sociétés où on est disposés à sacrifier sa liberté, son autonomie, pour avoir la paix, la tranquillité, bref des sociétés où on n'a pas besoin de se prendre la tête comme on dit ?


Ça concerne d'abord les relations entre les hommes et les femmes. Il y a maintenant une suspicion généralisée entre les sexes. Il y a peu de temps encore, ma principale crainte lorsque je prenais le métro, c'était que mes talons aiguille ne se prennent dans les rainures des escalators. Mais on vient de me faire savoir que c'était un endroit extrêmement dangereux peuplé de voyeurs, frotteurs, violeurs et que, d'une manière générale, je vivais dans un monde angoissant au sein duquel je n'étais pas assez prudente, méfiante.


Ouh la, la ! On vit dans la parano, l'obsession ! J'ai déjà parlé de ça mille fois mais c'est sûr qu'on entretient maintenant les femmes (et surtout les Françaises) dans une trouille permanente. Elles ne seraient que de pauvres petites créatures confrontées à des mâles obsédés, qu'un rien excite. Sur ce point, on est à peine plus modernes que dans les pays musulmans. Le port du voile, on n'en est pas encore là mais d'ores et déjà, beaucoup de femmes choisissent de s'habiller comme des sacs pour "ne pas provoquer". Et je ne serais pas étonnée qu'on accepte bientôt des transports, des piscines, des plages, des établissements scolaires etc... réservés aux femmes. Les mentalités sont prêtes et ça apparaîtrait plus sûr, ça permettrait d'être protégées, on serait plus tranquilles.
























L'autre symptôme de notre islamisation croissante, c'est la remise en cause, quasi permanente, de l'institution judiciaire. La Justice, on ne cesse, aujourd'hui, de la critiquer. Elle est lourde, lente, encombrée de procédures infinies, et surtout, elle ne fait pas droit aux victimes, elle est plutôt complaisante avec les assassins et les violeurs. Les peines prononcées seraient scandaleusement légères. Il faut donc en rajouter: c'est pour ça qu'on fait pression, par exemple, pour interdire les concerts de Bertrand Cantat et qu'on parle de créer un crime aggravé, celui de "féminicide".


















Chacun, maintenant, a son avis tranché sur les affaires judiciaires en cours. Et c'est bien sûr amplifié, facilité, par les réseaux sociaux et les medias avec leurs soit-disant "journalistes d'investigation". Le plus souvent, c'est l'hallali généralisé, on se déchaîne, et on a tôt fait de déclarer coupable un suspect sur la base de quelques approximations. La présomption d'innocence, les droits de la défense, c'est vraiment tout à fait superflu.










On voudrait faire justice soi-même, on voudrait une justice du peuple, rapide et exemplaire et, surtout, une justice qui serait morale (impitoyable avec les pervers, les détraqués, les riches).

Dans ce cadre, évidemment, une justice islamique conviendrait tout à fait. Ceux qui la pratiquent soulignent justement ses avantages par rapport à la justice occidentale: sa rapidité, sa simplicité, sa conformité à la morale islamique. A quoi bon s'encombrer de procédures alors qu'on peut aller vite et qu'on peut juger facilement ? Et c'est sûr que la justice islamique est efficace: à titre d'exemple, dans un pays que je connais bien, l'Iran a exécuté, en 2016, 567 personnes (par pendaison à une grue exhibée dans la ville). La majorité, c'est pour trafic de drogue (à partir de seulement 30 grammes !) mais ça peut aussi être pour homosexualité.


Dès lors, si on n'a que ces soucis moraux ou d'efficacité et de rapidité, il suffit d'écouter les victimes parce que les plaignant(e)s ont bien sûr toujours raison.

Et pour accélérer encore les choses, on encourage la dénonciation tous azimuts. Pas besoin de preuves, il faut d'abord parler, s'exprimer, dit-on. C'est merveilleux, la parole se libère, j'entends ça tous les jours.


On redécouvre, en fait, une vieille jouissance, celle de "balancer" pas seulement son porc mais aussi son employeur, son entreprise. On encourage maintenant à dénoncer tous les faits délictueux que l'on constaterait dans son entreprise. On réclame même un statut protecteur pour les "lanceurs d'alerte", ces nouveaux héros, ces chevaliers vertueux des temps modernes. Oserais-je le dire, les "lanceurs d'alerte", ça n'est qu'une appellation moderne des "corbeaux" et ce ne sont, à mes yeux, que des crapules comme beaucoup d'autres.


On ne recule d'ailleurs devant rien, en dehors des affaires criminelles, pour confondre les supposés coupables: écoutes téléphoniques, non respect du secret professionnel. Nos téléphones, nos ordinateurs, nos logements ne garantissent plus notre vie privée, ne sont plus les sanctuaires de notre liberté.

Tout cela m'effraie et j'ai l'impression que l'on devient tous, plus ou moins, des coupables en sursis. Mais avant d'avoir à affronter, un jour, la vindicte populaire, j'espère, au moins, que je continuerai de vivre dans un Etat de Droit où je bénéficierai notamment du droit d'être défendue. Le Droit, malgré tout, c'est le rempart de la démocratie.












Tableaux du peintre polonais Mikolaj KASPRZYK né en 1952.

dimanche 1 avril 2018

Des origines


On m'a traînée à un film, paraît-il tellement sympa et tellement drôle, "La Ch'tite famille" de Dany Boon.

Quelle horreur! Le succès du film traduit bien, je crois, la montée du populisme en France.


L'anti-intellectualisme, l'anti-parisianisme, pourquoi pas ! Mais je ne vois pas en quoi parler ch'ti et manger du maroilles est gage d'une plus grande authenticité. Ça n'est pas non plus un brevet de générosité et de chaleur humaine.


On nous fait maintenant sans cesse la morale, on distille des leçons grossières, simplistes: il faudrait ne jamais oublier d'où l'on vient, ne jamais perdre ses racines, il faudrait retrouver, au contraire, les vraies valeurs, celles de la famille avant tout.


Brr ! Ça sent un peu le moisi! Je ne me sens pas obligée de partager ce point de vue même si je suis, moi aussi, une étrangère à Paris. Certes, je ne parle aucune langue sans accent (même le français pour lequel j'ai, paraît-il, une diction particulière, précieuse), je mange des choses bizarres (du bigos, des varenyky, des harengs, du poisson-chat) et je préfère la bière au vin. Quant à ma ville d'origine, ma famille, j'en ai déjà parlé et j'entretiens, d'une manière générale, des rapports distants. Plus au-delà, mes ancêtres, ma généalogie, j'y suis totalement indifférente, je ne pense pas que cela soit intéressant, édifiant.


Dans tout cela, il n'y a aucun titre de gloire et je n'ai vraiment pas l'impression que ce soit ça qui me constitue. Je ne suis pas moins apprêtée, plus sincère, plus sympathique, chaleureuse, qu'une Parisienne de souche et d'ailleurs j'ose dire que j'apprécie les Parisiens et me sens Parisienne. Je n'ai vraiment pas l'impression que je me retrouverais, que je serais plus conforme à moi-même, en devenant une Ukrainienne authentique. Les leçons de vie, je ne les attends pas du passé, des traditions; quant aux racines, je n'en ai rien à fiche.


C'est même exactement le contraire. Je me suis plutôt construite en m'arrachant à mes origines, géographiques, biologiques. Et ça vaut sans doute pour moi comme pour tout le monde. On ne conquiert son individualité qu'en se libérant de ce qui nous détermine. Savoir changer, évoluer, s'adapter, s'ouvrir aux autres, c'est ça qui est important. C'est un antidote à la morale sinistre et régressive des Ch'tis mais c'est sans doute plus exaltant, plus dynamisant.
























Tableaux du peintre tchèque Frantisek KUPKA (1871-1957) auquel le Grand Palais consacre en ce moment une belle exposition. Ce qui est intéressant chez Kupka, c'est que sa création a beaucoup changé, beaucoup évolué tout au long de sa vie. C'est là encore un beau démenti à cette idée qu'il faudrait être soi-même, coïncider avec ses origines.